La mise en place d’une stratégie CSR s'impose aujourd’hui comme une priorité incontournable pour les entreprises qui aspirent à un rôle positif dans la société.
La Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), ou Corporate Social Responsibility (CSR) en anglais, permet non seulement de répondre aux défis sociaux et environnementaux actuels, mais aussi de renforcer la réputation, la compétitivité et la pérennité des entreprises.
Cet article vous propose d’explorer les différentes facettes de la RSE, ses champs d’application et son cadre réglementaire, tout en découvrant des exemples de structures engagées.
Corporate Social Responsibility et Responsabilité Sociale des Entreprises : définition
En 1953, Howard Bowen propose une première caractérisation de la CSR dans son ouvrage intitulé Responsibilities of the businessman, alors qu’il évoque « l’obligation pour les hommes d’affaires de réaliser les politiques, de prendre les décisions et de suivre les lignes de conduite répondant aux objectifs et aux valeurs qui sont considérés comme désirables dans notre société ».
Elle est définie par la Commission Européenne comme la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu'elles exercent sur la société, au-delà de leurs obligations légales et économiques traditionnelles.
La CSR désigne ainsi aujourd’hui l'intégration par les entreprises de préoccupations sociales, environnementales et économiques dans leurs activités commerciales, leur réflexion stratégique et leurs relations avec leurs parties prenantes.
Elle englobe aussi la contribution des organisations aux différents enjeux du développement durable.
Selon l’étude menée en 2023 par l’organisme de notation spécialisé EcoVadis, avec un score global de 57,6/100 en 2022, contre 54,3/100 en 2021 et 51/100 en 2019, les entreprises françaises ont amélioré leurs résultats en matière de RSE. Ce score reste d’ailleurs supérieur aux moyennes 2022 de l’UE (55,1) pour toutes les tailles d’entreprises.
Au niveau mondial, sur l’ensemble de l’échantillon Union européenne/OCDE/BICS, les entreprises françaises, toutes tailles confondues, se classent en quatrième position derrière les pays nordiques et devant l’Italie, le Royaume-Uni, l’Allemagne, les États-Unis et la Chine.
Bon à savoir : que l’on parle de CSR ou de RSE, il s’agit toujours d’une démarche volontaire. Toutes les entreprises peuvent procéder à sa mise en œuvre, et ce quelle que soit leur taille, leur forme juridique ou leur secteur d'activité.
Les trois domaines de la responsabilité sociale des entreprises
Selon la sociologue Stefanie Hiß, la RSE se décline en trois domaines principaux : la responsabilité interne, la responsabilité intermédiaire et la responsabilité externe. Chacun de ces domaines couvre différents aspects des interactions de l'entreprise avec ses parties prenantes.
1. La responsabilité interne
La responsabilité interne concerne les actions menées au sein de l'entreprise pour garantir le bien-être et la satisfaction des employés, ainsi que pour améliorer les stratégies et les processus internes.
Cette facette, guidée par un code moral spécifique, inclut une bonne gestion des ressources humaines, le respect de la formation et du développement professionnel, ou encore de l'égalité des chances entre les salariés.
Elle prend également en compte la conformité juridique, la planification de croissance et l’efficacité économique, lesquelles dépendent de l’exécutif et influencent les décisions importantes.
2. La responsabilité intermédiaire
La responsabilité intermédiaire comprend toutes les actions de l’entreprise, dont les effets sur l'environnement et la société peuvent être mesurés plus ou moins directement.
Stefanie Hiß suggère ensuite que ce domaine se réfère principalement aux différentes parties prenantes détaillées ci-dessous.
Les salariés
Les entreprises responsables et engagées dans une politique RSE veillent à offrir de bonnes conditions de travail et à respecter les droits des travailleurs.
Pour cela, leur charte inclut par exemple des politiques de rémunération équitables, des informations transparentes sur les opportunités de carrière, ou des initiatives visant à favoriser le bien-être au travail.
En cas de mécontentement de la part des salariés, l’organisation doit aussi interagir de manière constructive avec les syndicats pour éviter les grèves.
Les prestataires de capitaux propres et d'emprunt
Les entreprises doivent ici adopter une gestion financière transparente et éthique, garantissant une communication honnête et régulière avec les investisseurs ou les prêteurs.
Cette démarche s’accompagne ainsi de rapports financiers précis, ainsi que d’une administration prudente des ressources financières.
Les clients
La responsabilité envers les clients implique la fourniture de produits et services de haute qualité, sûrs et fiables.
De la même façon, ces derniers ne doivent pas être trompés face à des produits survendus ou caractérisés par de fausses informations, comme dans le cas du greenwashing. Chaque client a ainsi accès aux données concernant la fabrication, la composition du produit, ou encore l’origine de ses matières premières.
Les entreprises doivent aussi assurer un service client efficace, tout en prenant en compte les retours des consommateurs pour améliorer leurs offres.
Les résidents locaux
Toujours pour leur CSR, les entreprises doivent en outre considérer l'impact de leurs activités sur les communautés locales, en veillant à ne pas perturber leur qualité de vie, et en minimisant les nuisances (sonores, visuelles), ou la pollution de l’environnement (eau, biodiversité).
Elles peuvent ensuite déployer des programmes de soutien aux événements régionaux, des investissements dans l'infrastructure ou des partenariats avec des organisations communautaires.
Les agences gouvernementales
Les entreprises sont dans l’obligation de respecter les lois, les normes de qualité et les réglementations imposées par les organismes publics du pays où elles sont installées.
Dans les installations de production, les normes de qualité et les réglementations spécifiées par le législateur doivent être respectées, et ne pas être falsifiées lors des contrôles correspondants.
Elles peuvent également participer activement aux initiatives publiques visant à améliorer les conditions sociales et environnementales.
Les médias
Également appelés le « quatrième pouvoir », les médias ont un impact énorme sur la visibilité de l’entreprise.
Une bonne stratégie RSE, transparente et proactive, permet de gérer la communication de l’entreprise, que ce soit dans la presse ou sur les réseaux sociaux.
Il s’agit en pratique de communiquer ouvertement sur leurs activités, leurs politiques RSE et leurs impacts, tout en se montrant réceptives aux critiques et aux suggestions d'amélioration.
3. La responsabilité externe
Les entreprises assument enfin une responsabilité sociale en dehors de leurs propres activités, et sont pour cela encouragées à soutenir différentes initiatives : on retrouve ici la notion de citoyenneté d' entreprise. Les donations ou l’organisation d’événements caritatifs (galas, marathons de collecte) en sont un bon exemple, de même que le sponsoring vis-à-vis de structures engagées.
Certaines structures accordent des congés à leurs employés pour la mise en œuvre d’activités sociales, généralement réglementées dans les contrats de travail (les salariés bénéficiant par exemple d'une demi-journée de travail par trimestre). Elles sont donc prêtes à soutenir et même à payer les activités sociales de leurs employés (en enregistrant ces activités comme temps de travail).
La plateforme Wenabi se propose de relier les besoins d’associations avec des entreprises et des salariés qui souhaitent s’engager, à travers différents formats : dons, volontariat, mécénat, appel à projets, etc.
Qu'en est-il en matière de réglementation en France ?
En matière de réglementation en France, la Responsabilité Sociale des Entreprises est encadrée par plusieurs lois et directives visant à promouvoir des pratiques éthiques, durables et transparentes.
Si l’on se penche sur cette timeline légale, en voici les principaux points :
- en 2001, la loi NRE (Nouvelles Régulations Économiques) de 2001 introduit l'obligation pour les grandes entreprises françaises cotées en Bourse de publier des informations sociales et environnementales dans leur rapport de gestion annuel. Il s’agissait de la première législation à imposer des exigences de reporting RSE sur notre territoire
- en 2010, la Loi Grenelle II renforce ces obligations en élargissant le périmètre des entreprises concernées, et en précisant les informations à publier. Elle impose notamment aux entreprises de plus de 500 salariés, et qui réalisent un chiffre d'affaires de plus de 100 millions d'euros, de rendre compte de leurs performances en matière de développement durable.
- en 2014, la Directive européenne sur la publication d’informations non financières (NFRD) oblige les grandes entreprises à publier des informations relatives à leurs impacts sociaux et environnementaux, à leurs actions en matière de droits de l'homme, de lutte contre la corruption et à la diversité au sein des conseils d'administration
- en 2017, la loi sur le devoir de vigilance impose aux grandes entreprises de mettre en place un plan spécifique pour identifier et prévenir les risques d’atteintes aux droits humains et aux libertés fondamentales, à la santé et à la sécurité des personnes, ainsi qu’à l’environnement. Elle concerne les entreprises employant au moins 5 000 salariés en France, ou 10 000 à l'international
- en 2019, la loi PACTE (Plan d'Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises) met en place trois grandes mesures pour les entreprises françaises. L’article 1833 du Code Civil a ainsi été modifié afin que l'objet social de toutes les sociétés intègre la considération des enjeux sociaux et environnementaux, quand l'article 1835 reconnaît désormais la possibilité aux sociétés qui le souhaitent de se doter d'une raison d'être dans leurs statuts. Le statut d’entreprise à mission a également été créé : c'est la fameuse raison d'être dont on vous parlait dans cet article !
L'Association Française de Normalisation propose une certification spécifique pour les entreprises engagées dans une démarche CSR.
Il faut également préciser le lien entre la RSE et différentes normes ISO à l'échelle internationale :
- la norme ISO 26000 fournit ainsi des lignes directrices pour aider les entreprises et les organisations à mettre en œuvre des pratiques socialement responsables.
Publiée en 2010, cette dernière aborde sept questions centrales : la gouvernance de l'organisation, les droits de l'homme, les relations et conditions de travail, l'environnement, la loyauté des pratiques, les questions relatives aux consommateurs, et les communautés et le développement local
- la norme ISO 14001 concerne quant à elle la gestion environnementale, et précise les contours d’un système de management environnemental (SME). Elle est certifiable et reconnue mondialement.
- la norme ISO 14001 contribue aux pratiques de RSE en aidant les entreprises à minimiser leur impact environnemental, à se conformer aux réglementations légales et à améliorer leur efficacité dans l'utilisation des ressources.
- la norme ISO 45001 s’applique enfin à la santé et la sécurité au travail, afin d’aider les organisations à réduire les risques professionnels et à créer de meilleures conditions de travail. Elle est directement liée aux aspects sociaux de la RSE, en mettant l'accent sur le bien-être et la sécurité des employés.
Quelques exemples de mise en œuvre et de gestion de politiques RSE ou CSR en entreprise
De nombreuses structures se démarquent aujourd’hui par l’application d’une gestion responsable et d'une politique CSR engagée.
Patagonia
Patagonia incarne un exemple emblématique d'entreprise intégrant la responsabilité d' entreprise au cœur de sa stratégie.
L’organisation est ainsi connue pour ses nombreuses initiatives en faveur de la protection de l’environnement, comme l'utilisation de matériaux recyclés, la réparation de produits pour prolonger leur durée de vie, ou encore le soutien à des causes environnementales à travers le don d'un pourcentage de ses ventes.
Concrètement, Patagonia a adopté de nombreuses mesures spécifiques, voire pionnières, dans la mise en place de sa politique CSR :
- le duvet traçable contre l’exploitation abusive de la faune et de la flore
- l’utilisation de coton biologique
- la participation au programme Fair Trade
- la certification Bluesign : ce label étudie chaque phase de la chaîne d’approvisionnement textile, afin d’éliminer tout produit contenant des substances nocives, et de privilégier les produits sûrs pour l’environnement et les employés
- le mouvement Worn Wear, un service pour aider les consommateurs à réparer et garder leurs affaires le plus longtemps possible
Son fondateur, Yvon Chouinard, a d’ailleurs indiqué en 2022 que “la Terre était désormais le seul et unique actionnaire de Patagonia”.
Pour ce faire, il a transmis 100 % du capital de son entreprise et de ses droits de vote à deux structures chargées de protéger la planète, mission officiellement endossée par la société depuis 2018.
Danone
Au cours des dernières années, Danone a mis en place plusieurs initiatives RSE, notamment son programme « One Planet. One Health. ». Celle-ci s’articule autour des trois axes majeurs de la CSR.
- la RSE sociétale de Danone s’appuie sur la promotion du développement de produits bénéfiques pour la santé.
- la RSE économique de Danone est liée à la première par la démarche RESPECT depuis 2005, et vise à une confiance accrue entre les différentes parties de l’écosystème
- la RSE environnementale s’applique évidemment aux défis qui secouent le secteur agroalimentaire, mais aussi industriel. Pour diminuer son empreinte carbone, et dans une visée d’économie circulaire, le groupe s’appuie par exemple sur son partenariat avec Loop Industries depuis 2022, afin d’améliorer le recyclage des bouteilles en PET en boucle fermée
L'Oréal
L'Oréal s'engage enfin à respecter des normes élevées en matière de durabilité avec son programme « Sharing Beauty With All ». Ce dernier inclut tout d’abord d’importants objectifs en matière de réduction des émissions de CO2 ou des déchets, en réduisant l’utilisation de matières plastiques dans les emballages, ou en favorisant le recyclage et la réutilisation des matériaux. Il vise aussi à l’amélioration de l’efficacité énergétique des sites de production, par le biais de l’utilisation des énergies renouvelables.
Par ailleurs, le programme L’Oréal Citizen permet à ses employés de s’investir dans des projets sociaux, environnementaux et solidaires sur leur temps de travail. Il propose différentes formes d’engagement, allant du bénévolat ponctuel à des missions de volontariat de longue durée, en passant par des actions de sensibilisation et de formation. Les employés peuvent ainsi participer à des projets locaux ou internationaux, en partenariat avec des associations, des ONG ou des institutions publiques.
La Corporate Social Responsability s’impose donc comme un concept crucial pour les entreprises. Bien plus qu'une simple tendance ou un outil marketing, cette approche essentielle permet aux entreprises de jouer un rôle actif et positif, tout en restant alignées avec leurs valeurs.
En adoptant un code de conduite responsable, les organisations peuvent non seulement renforcer leur relation de confiance avec leurs parties prenantes, mais aussi renforcer leur compétitivité et leur résilience à long terme, pour la construction d’un avenir durable.